Pourquoi le cap du 10 % de femmes dans l’industrie du camionnage semble-t-il toujours hors d’atteinte ?
- Francis Tremblay
- il y a 6 jours
- 2 min de lecture

Malgré des années d’efforts, de campagnes de recrutement et de programmes incitatifs, la proportion de femmes dans l’industrie du camionnage au Québec stagne toujours autour de 4 à 6 %. L’objectif symbolique du 10 %, fixé depuis plus d’une décennie par plusieurs associations, paraît toujours difficile à atteindre. Pourquoi ?
Une culture encore perçue comme masculine
Le camionnage demeure un milieu où la tradition pèse lourd. Beaucoup de femmes intéressées au métier disent encore se heurter à des préjugés : doutes sur leur force physique, leur endurance ou leur capacité à concilier travail et vie personnelle.
« Il faut souvent prouver deux fois plus qu’un homme qu’on est capable », confie une diplômée récente d’un DEP en transport par camion. Certaines entreprises ont progressé, mais le changement de mentalité prend du temps dans un environnement historiquement masculin.
Conciliation travail-famille : un défi réel
Les longues heures sur la route, les départs à l’extérieur pendant plusieurs jours et l’imprévisibilité du métier rendent la conciliation travail-famille particulièrement difficile.
Beaucoup de femmes abandonnent l’idée de conduire à temps plein lorsqu’elles ont de jeunes enfants, faute de structures adaptées. Les postes locaux, en transport régional ou de courte distance, sont encore peu nombreux et très compétitifs.
Manque de modèles et de visibilité
La rareté de figures féminines médiatisées dans l’industrie contribue aussi au problème. Les femmes camionneuses sont souvent isolées sur la route, et peu d’entre elles sont mises en avant dans les campagnes de recrutement.
Des initiatives comme Camionneuses Québec ou la Women’s Trucking Federation of Canada jouent un rôle crucial : elles offrent du mentorat, de la visibilité et une communauté d’entraide. Mais ces efforts demeurent encore marginaux face à l’ampleur du défi.
Des infrastructures peu adaptées
Même en 2025, beaucoup de haltes routières, garages et terminaux manquent d’installations sécuritaires et inclusives : vestiaires, douches, stationnements bien éclairés.
Certaines camionneuses évoquent aussi un sentiment d’insécurité la nuit dans certains truck stops, notamment aux États-Unis. Ces réalités concrètes découragent encore plusieurs candidates potentielles.
Une lueur d’espoir
Les choses bougent lentement, mais elles bougent. De plus en plus de centres de formation, comme le CFTR et le CFTC, rapportent une hausse du nombre d’inscriptions féminines. Les campagnes de sensibilisation sur les réseaux sociaux, menées par des médias comme On the Road Québec, contribuent à changer les perceptions.
Des entreprises québécoises commencent à revoir leurs horaires, à proposer du travail en solo local, ou à offrir du mentorat par des pairs féminins.
Atteindre le 10 % de femmes dans l’industrie du camionnage ne relève pas seulement du recrutement, mais d’une transformation culturelle et structurelle : horaires plus humains, infrastructures sécuritaires, reconnaissance du professionnalisme féminin, et visibilité accrue.
Le jour où ces conditions seront réunies, le 10 % cessera d’être un objectif lointain… pour devenir une réalité sur nos routes.



